samedi 9 janvier 2010

La biomasse forestière ou l’art de brûler le potentiel de régénération des forêts du Québec !

La nouvelle et désastreuse filière énergétique de la biomasse forestière tombe à point nommé pour l’industrie du bois au Québec. En effet, le gouvernement provincial donne désormais son aval à la collecte industrielle des arbres commerciaux non récoltés, des arbres et arbustes sans valeur commerciale, des arbres en zone de feu ou en zones propices aux épidémies d’insectes ravageurs, ainsi qu’à près de 70 % des résidus abandonnés sur les des parterres de coupe.

Cette biomasse, pourtant cruciale à la régénération des forêts, est ainsi octroyée aux forestières dans le but de produire 125MW d’électricité, énergie ensuite revendue à Hydro-Québec Distribution. Ventée comme une énergie alternative et verte, cette nouvelle filiale énergétique menace cependant la productivité et la biodiversité des forêts touchées par cette collecte de tiges ligneuses, autrefois sans attrait pour l’industrie. C’est que la biomasse forestière agit comme un amendement, un véritable engrais, pour les sols forestiers, passablement fragilisés par la machinerie lourde et le lessivage des minéraux par les pluies. De plus, les tiges laissées au sol assurent abris et nourriture à la faune, pour qui l’habitat est d’ores et déjà grandement dégradé.

Ainsi, les débouchés de la biomasse forestière sont loin d’être verts. Qualifiée de «carboneutre» par ses partisans, l’énergie issue de la combustion de la biomasse forestière concourt plutôt aux changements climatiques. En effet, la collecte, la transformation et la distribution de cette énergie se font non sans libérer une quantité importante de GES dans l’atmosphère. Et, quant aux affirmations selon lesquelles le carbone libéré par la combustion des tiges sera capté à nouveau par la forêt en croissance suite aux coupes, il faut ajouter une précision ; selon les prévisions scientifiques, il faut près d’un siècle pour que le carbone émis ne soit à nouveau stocké dans la biomasse en croissance. La biomasse forestière, telle que développée actuellement, est donc loin d’être «carboneutre» !

Qui plus est, l’encadrement de cette nouvelle filière énergétique est plutôt leste, voire même carrément inadéquat. À preuve, aucune étude d’impacts environnementaux, ni consultation publique sur la question, n’a été commandée par les autorités gouvernementales. Pour certains, il s’agit donc d’un réel dérapage environnemental. Faut-il également ajouter que la biomasse, étant de faible densité énergétique (autrement dit, peu efficace), nécessitera des quantités astronomiques de matières premières, prélevées à même nos forêts, déjà essoufflées, malmenées et vulnérables. Une preuve ? Pour produire ces 125 MW d’énergie issue de la biomasse forestière, près de 1,1 million de tonnes métriques (ou sèche) de matières ligneuses sera brûlée annuellement ! Ces chiffres proviennent d’ailleurs de sources gouvernementales ! Et c’est sans compter la participation de cette filière énergétique, soit disant écoénergétique, aux dérèglements climatiques !

La tangente que prend le gouvernement québécois dans ce dossier est inquiétante. Alors, que le monde se tourne résolument vers de réelles technologies énergétiques vertes, comme l’éolien, le solaire ou la géothermie, le Québec se fige dans une gestion désuète de ces matières premières, hypothéquant gravement ce qui nous reste de nos forêts. Laissons la forêt se régénérer, la faune se remettre de toutes ces années d’exploitation effrénée et irresponsable, les sols se reconstituer après tant de perturbations et travaillons de concert avec la nature, plutôt que de spolier davantage ses chances de survie. Appelons le gouvernement québécois à protéger la biodiversité et le climat !

Pour obtenir davantage d’informations sur la situation de la biomasse forestière au Québec : http://www.greenpeace.org/canada/fr/campagnes/foret-boreale/dangers/biomasse

Consultez également le site de la Coalition Bois ; http://www.coalitionbois.org

Pour connaître les dangers qui pèsent sur la forêt Boréale canadienne ; http://www.greenpeace.org/canada/fr/campagnes/foret-boreale/dangers


M.
(Source : Nicolas Mainville, Brûler nos forêts pour faire de l’énergie ?, Réseau vert, Volume 17, numéro 13, Hiver 2009-2010, p.8)

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