lundi 22 février 2010

Les médias et le discours écologiste ; une participation à la dérive


Décidément, le discours écologiste est de toutes les tribunes, trouvant son écho à la fois dans les médias électroniques, télévisés ou traditionnels (journaux, revues, etc.). Le mouvement vert n’a jamais été aussi galvanisé, littéralement propulsé par une communauté internationale mobilisée et prête à accomplir un certain virage. Cependant, difficile de se retrouver dans cette mer chaotique d’informations parfois contradictoires, de discours souvent partisans et de désinformation programmée … Ainsi, il apparaît que les médias concourent, sciemment ou non, à cette dérive du discours écologiste.

Trop souvent, la couverture des médias ne tient pas compte de la véritable nature des enjeux environnementaux, complexes et ramifiés.
Les articles ou les dossiers de presse présentent des enjeux simplifiés, une vulgarisation incomplète ou incorrecte, des propos de spécialistes cités hors contexte. Bref, les titres accrocheurs annonçant des couvertures plutôt racoleuses tendent à s’approprier l’espace médiatique au détriment des articles de fond et de la véritable vulgarisation scientifique. Un exemple patent de cette dérive du discours écologiste par l’entremise des médias ; le sacro-saint sac réutilisable, érigé en véritable symbole de la lutte écologiste, présenté comme le geste ultime qui permet de consacrer sa ferveur à Dame Nature.

Or, à force de marteler ce message à tort et à travers, jusqu’à créer un sentiment de culpabilité chez les délinquants, les médias ont tout simplement occultés les aspects fondamentaux de ce geste ; la réduction à la source des matériaux polluants et le questionnement intrinsèque de nos modes de consommation, primordial à un changement de mentalité et à la réelle sauvegarde des écosystèmes mondiaux. Résultat ; il s’opère actuellement une surconsommation de ces sacs réutilisables, trop souvent produits à l’étranger, avec des matériaux dérivés du pétrole, bref, affichant une empreinte écologique effroyable. Curieusement, aucune mention ou presque de cet échec dans l’ensemble de la sphère médiatique… Et, il y a pire, car l’effet hautement pernicieux de cette situation réside en un désengagement de la population face à un discours écologiste confus, mal rapporté ou mal documenté.

À terme, les enjeux environnementaux sont traités comme de simples faits divers. Pourtant, les médias, censés être consacrés à la diffusion, la transmission et la communication d’informations d’importance aux lecteurs et auditeurs devraient s’attarder davantage aux enjeux environnementaux, puisqu’ils sont devenus, au fil des ans, des responsabilités collectives et des préoccupations de santé publique, et non des choix individuels comme certains le prétendre.

En outre, les médias de masse amplifient la dérive en devenant des vecteurs de diffusion des publicités mensongères, des campagnes douteuses de marketing vert et du greenwashing industriel. Ce faisant, des comportements de consommation s’immiscent dans l’esprit populaire, contribuant à accentuer les dérapages. Une illustration de ce phénomène ? Des publicités ventant les mérites d’un savon à vaisselle sur des oisillons victimes d’un déversement pétrolier. Or, des quantités infimes de ce produit, à peine plus grosses qu’une pièce de 25 cents, peuvent engendrer la mort d’un oiseau (Brown, 2003), en raison des propriétés physiques de cette substance qui conduisent à l’hypothermie en réduisant l’imperméabilité du plumage (Bernier et Lévesque, 2009)et de la toxicité évidente des hydrocarbures, étant potentiellement cancérigènes et génotoxiques, dépendamment de leurs formules chimiques (Office fédéral de la santé publique de Suisse, 2008). Inutile, donc, de faire tremper un oisillon dans l’eau savonneuse… si ce n’est pour tromper l’auditoire en insinuant que ce produit est un choix environnemental ou « eco-friendly ».

Étant donné l’ampleur et la vastitude de la crise écologique actuelle, du déclin de la biodiversité mondiale, des dérèglements climatiques, de la fragmentation des écosystèmes, de l’épuisement des ressources naturelles, de la pollution des cours d’eau, de la dégradation de la qualité de l’air et de la hausse effrénée des inégalités environnementales, force est désormais de constater qu’il est de la responsabilité de chacun de veiller à être informé adéquatement quant aux problématiques environnementales, de manière à y répondre efficacement, dans le but ultime de préserver ce qui reste de notre planète bleue. Devant cette dérive du discours écologiste dans les médias populaires, il apparaît donc que ces réponses se trouvent plutôt dans les médias alternatifs, les livres ou revues scientifiques, les émissions à caractère informatif et les sources réellement crédibles, qui tentent de faire la part des choses en se basant sur de la documentation étoffée et solide. Visons donc la consommation responsable et non l’aliénation collective !


M.

Références bibliographiques ;

Bernier, I et C. Lévesque. 2009. Écologie appliquée ; notes de cours. Cégep Saint-Laurent. Ville Saint-Laurent.

Brown, R.G.B. 2003. (Page consultée le 3 mai 2009). Enjeux et thèmes : Les oiseaux et la pollution par les hydrocarbures. (En ligne).
http://www.hww.ca/hww2_F.asp?id=229#sid67

Office fédéral de la santé publique de Suisse. 2008. (Page consultée le 3 mai 2009). Les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). (En ligne).
www.bag.admin.ch/themen/chemikalien/00228/05582/index.html

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